Abbaye de La Lucerne
Une histoire mouvementée
L’abbaye de la Lucerne est une des premières abbayes de l’ordre des Prémontrés. Jusqu’à la Révolution française où elle est vendue comme bien national, on estime à 660 le nombre de chanoines qui ont fait de la Lucerne un lieu de rayonnement liturgique et missionnaire. Après l’épisode révolutionnaire, l’état vend l’abbaye à un particulier qui la transforme en filature de coton, puis en scierie de pierres. Pour les besoins de ces différentes activités, plusieurs bâtiments conventuels sont démolis ce qui entraîne l’effondrement d’une partie de l’église abbatiale. Plus tard, une des descendantes de cette lignée d’industriels donne une partie de l’abbaye à l’abbé Marcel Lelégard (1925-1994). Nous sommes en 1959. Commence alors sous l’impulsion de ce prêtre esthète et historien la sauvegarde des bâtiments et le rétablissement d’une vie spirituelle. En 1981, l’abbé Lelégard crée la Fondation Abbaye de La Lucerne, fondation reconnue d’utilité publique qui permet de pérenniser son projet de restauration patrimoniale et spirituelle. En 1994, à la mort de l’abbé Lelégard, la fraternité canoniale prend le relais, permettant ainsi de maintenir la vie spirituelle du lieu en y associant des laïcs, hommes et femmes. Le père Guillaume Antoine et le père Henri Vallançon en sont désormais membres et aspirent à y accueillir de nouvelles forces vives, laïcs ou clercs, pour les aider dans la mission qui leur est confiée par leur évêque : donner un nouveau souffle à la vie spirituelle de La Lucerne.
S’appuyer sur l’existant
« D’une manière officielle, aujourd’hui, un projet de renouveau commence dans l’abbaye de La Lucerne. Ce projet s’inscrit dans la longue tradition du lieu, depuis les origines et la présence des Prémontrés dès le XIIème siècle, jusqu’à l’immense travail de l’abbé Lelégard qui, après une période de détournement et d’abandon, s’est engagé à restaurer avec persévérance et passion l’abbaye, si chère à son cœur. Son rêve n’était pas seulement de relever ses murs, mais de redonner une âme à ce lieu en espérant le voir de nouveau habité par une communauté de prière et d’apostolat. Le projet culturel et spirituel qui s’apprête à naître cette année, sous la vigilance épiscopale, s’inscrit dans le sillage de cette tradition. […]. Il ne s’agit pas de bâtir ici un lieu clos ou sectaire, mais au contraire, un lieu de respiration. Un lieu dans lequel l’appel d’air de notre temps rencontrera le vent de l’Esprit Saint dans le souffle créateur de la tradition de l’Église. » + Laurent Le Boulc’h, Extraits de l’homélie d’installation du 8 septembre 2022.
L’héritage de l’abbé Lelégard est immense et le souhait de l’abbé Guillaume et de l’abbé Henri est avant de tout de s’appuyer sur l’existant, sur les statuts anciens et sains qui existent déjà de par la fondation patrimoniale et la fraternité canoniale. « Nous avons des trésors de rapport au temps, à la nature, à l’art, à la beauté dans ce lieu, il est grand temps de nous réapproprier cet héritage qui a une valeur missionnaire pour nos contemporains, explique l’abbé Guillaume. Notre monde a soif de cette histoire : depuis le 8 septembre, il n’y a pas un week-end où nous n’avons pas accueilli de jeunes ». « Nous sommes les héritiers de ceux qui nous précédent ; nous souhaitons recueillir cet héritage et le faire fructifier pour le monde d’aujourd’hui avec nos charismes propres et avec l’aide de ceux qui nous rejoindront, notamment les familles que nous avons vraiment à cœur d’attirer ici. », ajoute l’abbé Henri.
Un écrin de verdure ouvert sur le monde
La place du chant grégorien
L’abbaye de La Lucerne ne propose ni une vie de paroisse, ni une liturgie de paroisse. C’est un lieu de ressourcement spirituel connecté à la nature où l’Église renoue avec le monde de l’art et de la culture. Une place particulière est faite au chant grégorien, notamment au travers de la messe chantée chaque jour à 11h30 en semaine et à 10h30 le dimanche. Ce chant propre de l’Église, venu du fond des siècles, permet de se mettre vraiment en lien avec le cosmos et le Dieu créateur. La plupart des pièces ne sont chantées qu’une fois l’an, il y a donc un ancrage dans le temps, dans le calendrier, le rapport avec les saisons est très fort. « L’exigence de la vie chrétienne et l’appel à l’humilité nous invitent à ne pas vivre déconnectés des réalités du monde. Il y a une urgence à se reconnecter à la création et le cadre naturel extraordinaire de La Lucerne nous appelle au ré-enracinement et à la sobriété. Dans cet état d’esprit, il nous semble important de renouer avec de belles traditions liées aux saisons et au terroir comme les rogations avec la bénédiction de la terre ou encore des fêtes folkloriques normandes. », ajoute l’abbé Guillaume.
Un lieu sanctuaire
« Un de nos projets prioritaires est également de faire de cet espace un lieu sanctuaire : nous souhaitons que quiconque se rende ici puisse y trouver un prêtre disponible, insiste le père Henri. ‘Les chemins du Seigneur sont impénétrables’, nous nous en apercevons tous les jours ici au travers des rencontres que nous faisons. Près de 22 000 visiteurs se rendent chaque année à l’abbaye de La Lucerne ; le potentiel missionnaire du lieu est donc énorme, les demandes et les attentes de toutes ces personnes de passage sont très diverses. Une femme est venue l’autre jour car elle voulait échanger avec un prêtre alors qu’elle se posait la question d’avorter. Une autre demandait à mieux comprendre la théologie chrétienne alors qu’elle avait été interpellée par la conversion d’une chanteuse de rap à l’islam. De nombreux touristes restent quinze ou vingt minutes dans l’abbatiale alors que la messe y est célébrée. » « Nous ne connaissons pas l’issue de ces rencontres, elles appartiennent à Dieu, mais nous avons le sentiment, à titre personnel, d’agir en adéquation avec ce que notre ministère nous appelle à vivre. », ajoute l’abbé Guillaume.
Entrer en dialogue
« La grande diversité des personnes qui passent à La Lucerne et la visée culturelle du lieu nous préservent de la tentation qui pourrait exister de faire de La Lucerne un espace fermé qui se mette à l’abri de la société. » poursuit l’abbé Henri. Au contraire, La Lucerne est un espace ouvert, un lieu privilégié pour entrer en dialogue avec le monde. Les projets ne manquent pas pour concrétiser ces intuitions : retraites spirituelles, sessions de formation pour les paroisses ou les particuliers, accueils des pèlerins en route vers le Mont-Saint-Michel, résidence d’artistes, organisations de colloques, d’expositions et de concerts.
En attendant que les fonds nécessaires à la restauration des lieux et notamment à la réalisation d’espaces d’hébergement soient levés, il est déjà possible de se rendre à La Lucerne pour visiter le site, assister à la messe, déjeuner dans ce magnifique écrin de verdure, rencontrer un prêtre.
Informations pratiques
Messe chantée tous les jours à 11h30 en semaine, à 10h30 le dimanche.
Messe chantée tous les jours à 11h30 en semaine, à 10h30 le dimanche